Le couple et l'argent ≡ Titiou Lecoq

11.03.2025

Encore un ouvrage qui nourrit ma misandrie ! Avec Le couple et l’argent, Titiou Lecoq met en lumière un aspect souvent occulté de nos luttes féministes : les femmes sont globalement plus pauvres que les hommes, à cause de toute une série de discriminations, de stéréotypes et de mécanismes légaux. Un ouvrage indispensable, à lire le plus tôt possible, avant de prendre de grandes décisions dans votre vie !!

« La moitié de la population travaille gratuitement pour l’autre, et tout le monde s’en fout¹. »

En 2023 selon l’INSEE, les femmes sont payées 22 % de moins que les hommes dans le secteur privé. Une étude états-unienne démontre que les femmes noires perçoivent 38 % de moins que les hommes blancs et 21 % de moins que les femmes blanches. Nos carrières sont stoppées par le « plafond de verre » et les pénalités professionnelles justifiées par les congés maternité, alors qu’on subit justement une injonction à devenir mères !

Mais saviez-vous que les inégalités financières commencent dès le plus jeune âge ? D’après l’enquête de l’autrice, les petites filles touchent moins d’argent de poche que les petits garçons, mais reçoivent davantage de cadeaux, si bien que le rapport à l’argent est déjà différencié par le genre : les petites filles sont éduquées à séduire leurs parents afin d’obtenir le cadeau de leur choix, tandis que les garçons apprennent à gérer leur budget et demandent plus facilement des augmentations de leur argent de poche (comme dans la vie professionnelle !).

Les discriminations financières continuent toute la vie. Elles passent notamment par ce qu’on appelle la « taxe rose » sur les objets commercialisés pour les femmes (comme les produits de beauté et d’hygiène et les objets roses). Ainsi, on nous fait payer l’injonction à être belles, douces et sans poils (voir Beauté fatale de Mona Chollet) !

« Plus un métier est mal payé, plus il est féminisé, et plus il est féminisé, plus il est mal payé². »

Et ce n’est pas tout : les femmes épargnent moins, elles ont moins de patrimoine, et même, elles héritent moins que les hommes ! Le système fiscal est éminemment patriarcal et sexiste, puisqu’il récompense les hommes qui se marient avec une femme plus pauvre en diminuant fortement le taux d’imposition. Ainsi, par toute une série de mécanismes qui leur sont favorables (comme la « pension » alimentaire), les hommes s’enrichissent toujours plus au détriment des femmes qui sont précarisées. Les familles monoparentales sont majoritairement des femmes seules, et les retraités pauvres sont surtout des retraitées pauvres...

Titiou Lecoq explore les violences économiques qui se manifestent dans le couple marié hétérosexuel, qu’il s’agisse des maris qui imposent des choix professionnels à leur épouse, qui ne versent pas la « pension » alimentaire, qui confisquent les identifiants des impôts ou de la CAF, qui contractent des dettes à leur insu…

Le seul budget où, paraît-il, on y gagne, c’est dans le domaine des assurances : les hommes paient une assurance mécaniquement plus élevée parce qu’ils sont davantage responsables (et victimes) des accidents mortels de voiture…

Mon avis

J’avais déjà pris quelques renseignements sur les inégalités économiques, mais j’ai appris pas mal de choses en lisant Le Couple et l’argent, publié par les éditions L’Iconoclaste.

Nous sommes éduquées à douter de nous-mêmes, à nous sentir incapables et illégitimes, ce qui constitue un frein puissant pour s’affirmer et demander des promotions professionnelles.

Le plus terrible, c’est de prendre conscience que notre quête d’indépendance peut, paradoxalement, renforcer notre précarité et nous appauvrir. Nous cherchons à quitter le foyer familial, à devenir autonomes le plus tôt possible, mais c’est à notre détriment, tandis que les jeunes hommes restent environ 1 ou 2 ans de plus chez leurs parents, ce qui leur permet d’épargner un peu plus pour des projets futurs.

Notre ignorance sur les questions financières nous arnaque, sans compter que l’argent est tabou en général et dans le couple en particulier. Apprendre à gérer son budget est pourtant un élément clé pour acquérir son indépendance et se protéger des violences économiques.

Titiou Lecoq le martèle sans relâche : il faut savoir, savoir, savoir ! Ca passe par une lutte pour une politique fiscale féministe, mais aussi, à l’échelle individuelle, par l’éducation financière et la communication au sein du couple (qu’il soit hétérosexuel ou pas). L’amour, c’est aussi assurer la sécurité financière de l’autre !

Lisez Le Couple et l’argent de toute urgence, surtout avant de prendre des décisions cruciales dans votre vie : mariage, prêt, achat immobilier, négociation salariale…