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La Violence des riches ≡ Michel Pinçon et Monique Pinçon-Charlot

La Violence des riches Pinçon-Charlot BibliolingusLa Violence des riches
Chronique d’une immense casse sociale
Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon
La Découverte/Zone
2013

 

François Hollande, néolibéral depuis ses débuts en politique

Qui a dit : « La finance n’a pas de visage » ? Celui-là même qui côtoie les patrons voyous et qui est né du même moule Ena-HEC-Science Po. François Hollande est une imposture : désespéré par les voix pour Mélenchon, il a lancé une fausse croisade contre les riches. Mais comment croire que le changement viendrait de la « gauche » PS, sachant que toute cette oligarchie, « droite » et « gauche » confondue, roule pour sauvegarder ses privilèges de classe dominante, et que les clivages au niveau institutionnel ne sont qu’une façade ? N’oublions pas que la dérégulation du système bancaire et financier a commencé sous Mitterrand.

Les Pinçon-Charlot montrent, à travers des enquêtes et des promenades sociologiques passionnantes (notamment la visite du 16e arrondissement de Paris par des lycéens du 93), la violence symbolique des oligarques et comment leur domination se manifeste.

Une justice à deux vitesses

Les scandales politico-financiers ne manquent pas. La grande délinquance économique et financière ne se voit pas, mais pourtant elle existe. Détournements et abus de biens sociaux, opacité des montages financiers et juridiques, paradis fiscaux, fraude fiscale non pénalisée… La grande délinquance a pourtant un impact durable sur la société, bien plus que les petits voleurs et les dealers de shit montrés sévèrement du doigt et jugés en deux temps trois mouvements. Les « patrons voyous », eux, parviennent, grâce à la solidarité de classe (vous saurez qui gravite autour de Hollande), à obtenir l’incapacité des juges.

La domination est dans les têtes

Dans cette guerre psychologique, la classe dominante parvient à légitimer sa position, à accepter ses valeurs et le bienfondé de ses privilèges par le biais de l’art et de la culture, mais aussi du droit conçu par eux (un enfant d’ouvrier aura plus de mal à devenir magistrat qu’un fils de riche).

À ce titre, il est vital de dissimuler l’arbitraire des privilèges pour continuer à s’enrichir en toute impunité. Cette croyance de la réussite naturelle est la clé de voûte du système, c’est elle qui autorise la violence et l’assujettissement. Le talent et le mérite sont systématiquement mis en avant, en lieu et place de l’héritage et du privilège de la naissance. C’est tout gagné : le talent et le mérite sont présentés comme un modèle de réussite sociale, ce qui fait perdurer l’adhésion du peuple à cette hiérarchie des classes.

À l’autre bout de l’échelle sociale, nous sommes intimidés et respectueux de cet univers bourgeois que nous connaissons mal. La contestation sociale, même non violente, est criminalisée ; et par l’intimidation des beaux quartiers, nous sommes tenus à distance de leur monde. Ce livre explique tous les mécanismes de domination, comment asservir le peuple tout en lui donnant l’illusion de la liberté de ses choix.

Rencontre avec le livre

Les Pinçon-Charlot poursuivent dans cet ouvrage leur travail colossal de dénonciation des ultrariches. Je l’ai lu bien plus vite que la plupart des romans, en trois jours à peine, tant j’étais tenue en haleine par ce concentré de cynisme, cette impunité des fortunes sans complexe et sans morale assurée par la complexité des montages financiers.

Dans ce système oligarchique étroitement tissé, la distinction droite-gauche n’est bonne qu’à faire gloser les médias et faire croire que nous vivons en démocratie. Les quelques clivages idéologiques sont purement de surface, car la classe politique défend des intérêts économiques communs et n’a pour religions que l’argent et la pérennité de leur lignée.

Vous voulez des noms ? Vous voulez savoir qui fricote avec qui, qui est en conflit d’intérêt avec qui ? La force du travail des Pinçon-Charlot réside un langage accessible et débarrassé de toute langue de bois. Leur travail est d’autant plus passionnant qu’il n’est pas contesté par les personnes qu’ils nomment. Mais évidemment, ce ne sont pas ces auteurs, qui travaillent depuis trente ans sur la question, qui seront invités dans les grands médias.

Les Pinçon-Charlot invitent à la désobéissance civile, à être curieux des lois et des règles économiques (ce n’est pas un hasard si ces matières ne sont pas au programme scolaire général), à mieux connaître cette classe pour militer en faveur de la justice sociale.

Passionnant, nécessaire, écœurant, ce livre est une bombe ! Voilà l’un des livres de l’année 2015 qui m’aura le plus marquée sans aucun doute, et celui que je conseille à toute personne qui s’interroge sur la « démocratie » française et sur les jeux de pouvoir.

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+ Plein de romans sur Bibliolingus traitent de la richesse, mais aussi de la pauvreté et de la précarité

La Violence des riches
Chronique d’une immense casse sociale
Monique Pinçon-Charlot et Michel Pinçon
La Découverte/Zone
2013
256 pages
17 euros

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A
Des sociologues toujours passionnants.
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