Pascal Manoukian
Éditions Don Quichotte
2017
Charlotte et Karim vont avoir un enfant. Charlotte a réservé une table au Zébu blanc pour fêter l’événement avec ses amies de lycée. Karim a promis de venir, mais il va d’abord passer chez l’imam pour faire bénir son enfant.
Mais la vie ne tient qu’à un fil, et ce soir-là la vie de Charlotte et de 40 autres personnes est brisée par Aurélien, le kamikaze de Daech qui a choisi le Zébu blanc pour cible.
Karim, aveuglé par la souffrance et la vengeance, décide de partir en Syrie retrouver ceux qui ont lavé le cerveau d’Aurélien et l’ont privé du bonheur.
Je ne rencontre que très rarement les auteurs que je lis, sans doute par peur de la déception. Mais grâce à Manou se livre, j’ai eu l’occasion de rencontrer Pascal Manoukian lors de la parution de son superbe premier roman, Les Échoués, et j’ai été séduite par sa gentillesse, son humilité, son « accessibilité ».
Les attentats de Daech en France sont un sujet très sensible, d’autant que comme certains d’entre nous j’ai été affectée personnellement par les attentats de 2015. Mais ces attentats sont le point de départ de ce roman, qui ne vise pas à raconter le deuil mais à remonter le fil : qui sont ces personnes qui perdent pied, qui deviennent kamikazes ? Pourquoi font-elles ça ? Par quelles méthodes leur cerveau est-il lavé en Syrie ? Avec Karim, on fait le voyage de Paris à Raqqa en Syrie, et on tente de comprendre l’horreur, la haine absurde, la négation de tout. On découvre les rouages d’un business de la mort où les nouveaux candidats au « djihad » rapportent une fortune aux recruteurs via Facebook, où les exactions sont filmées et montées comme des films d’Hollywood à des fins de propagande.
Pascal Manoukian semble percevoir la fiction comme un outil à la fois sensible et didactique, et c’est exactement ma définition du roman engagé. Tout comme avec les réfugiés dans son premier roman, il s’est efforcé ici d’apporter une description interne du système Daech et un éclairage sur la situation géopolitique qui a mené à la guerre en Syrie depuis 2011. Il s’agit de faire le travail que les médias dominants ne font pas : informer au mieux les citoyens, sans invoquer toujours la peur et la haine de l’autre.
À chaque page du roman, j’ai souligné et apprécié tellement de phrases si claquantes et belles à la fois, même si le retour à la ligne a été à mon sens trop utilisé. Pascal Manoukian pénètre dans les cœurs de ces gens brisés par la vie et qui commettent ces actes horribles, et il nous enjoint, nous lecteurs, à être sensibles à notre prochain, à ne pas céder à la haine, à garder notre tolérance. Je crois toujours qu’il faut répondre à la haine par l’amour et la tolérance, même si c’est difficile au quotidien.
Voilà un roman haletant, terrible et audacieux, publié par les éditions Don Quichotte dont j’aime beaucoup le catalogue.
Les Échoués |
Nous aurons de l'or Jean-Eric Boulin
Les Français jihadistes David Thomson
Terroristes Marc Trévidic
Terreur dans l'Hexagone Gilles Kepel
L'Attentat Yasmina Khadra
1. Page 118.
Ce que tient ta main droite t’appartient
Pascal Manoukian
Éditions Don Quichotte
2017
288 pages
18,90 euros
Offert par l'auteur et l'éditeur