Dan Fante
Christian Bourgois éditeur
(désormais disponible chez 13e note éditions) 2001
Bruno Dante, le double romanesque de Dan Fante, a tout du loser au bout du rouleau : écrivain jamais publié, alcoolique, dépressif sujet à des accès de démence ou de violence, dépensier et toujours fauché… N’en jetez plus ! L’homme est broyé par les excès, au fond du trou, mais il essaie de s’en sortir avec les réunions des Alcooliques anonymes.
« Dans la rue, en allant au magasin, j’ai eu comme un éclair de compréhension. Ma vraie difficulté − mon problème −, ce n’étaient pas mes accès de dépression ou mon alcoolisme ou mes échecs professionnels, ni même la peur inexprimée d’être un foutu cinglé. Mon problème, c’étaient les gens. Et il y en avait partout2. »
Le voilà qui décroche, grâce à son contact ex-alcoolo, un poste dans une entreprise de télémarketing. Son nouveau job : vendre des cartouches d’encre par téléphone. A coups de tromperie et de manipulation, les télévendeurs s’acharnent à longueur de journée. C’est à celui qui décrochera le plus gros pigeon en vendant un maximum de cartouches.
Avec toutes sortes de primes et de concours, le patron cultive l’esprit de compétition et exige un surinvestissement constant de la part de ses télévendeurs qui n’ont même pas le statut de salarié, puisqu’ils sont embauchés en tant que travailleurs indépendants. Facilement éjectables et flexibles, exonérés de charges fiscales et sociales, c’est tout bénéf pour le patron qui n’hésite pas à encourager ses champions pour maintenir la pression au sein de l’équipe et empêcher la solidarité de naître.
Chacun pour soi, chacun sa prime. Vous quittez gaiement votre travail le vendredi pour aller aussitôt fêter la paie hebdomadaire que vous venez de recevoir. Les avantages sociaux sont réduits à peau de chagrin, l’avenir est incertain, mais l’argent peut couler à flot si vous savez entuber avec talent vos interlocuteurs.
Dans la lignée des beatniks, Bruno Dante sombre dans les excès et la dépression. À l’image de l’auteur, Dan Fante, fils du grand écrivain John Fante, Bruno n’a pas la vie facile.
À la fois pathétique et provocateur, carrément détraqué mais souvent drôle, il nous fait voir comment la valeur du travailleur se mesure à l’aune de sa productivité (et de sa rentabilité). Dieu Flexibilité, permettez-nous de vendre toujours plus de cartouches d’encre et à moindre coût !
Pourtant, Bruno Dante ne se laisse pas facilement appréhender. Même si La Tête hors de l’eau est écrit à la première personne, le récit est factuel, peu interrompu par des réflexions, même lorsque le personnage apprend une nouvelle grave.
D’autre part, l’écriture de Dan Fante n’est-elle pas surtout cathartique ? Car même le héros de la nouvelle que Bruno Dante écrit ressemble à s’y méprendre à Bruno/Dan. Le double romanesque, même s’il a l’air très proche de l’auteur, permet quand même de créer une distanciation, car il faut du cran pour écrire ce texte, par ailleurs souvent drôle, et beaucoup d’autodérision.
Malgré l’impression d’un personnage imperméable et réservé sur ses sentiments, La Tête hors de l’eau est un roman super bien rythmé, qui envoie sec à chaque page. Les frasques de Bruno Dante et les descriptions des personnages, tantôt attachants, tantôt antipathiques, sont percutantes qui l’emportent sur les quelques défauts du roman. Si vous aimez ce genre, alors c’est pour vous !
En crachant du haut des buildings
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En crachant du haut des buildings Dan Fante
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Dandy Richard Krawiec
Boulots de merde ! Enquête sur l'utilité et la nuisance sociales des métiers Julien Brygo et Olivier Cyran
Le Dernier Verre Daniel Schreiber
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La Tête hors de l’eau
(Mooch, titre original)
Traduit de l’américain par Jean-Pierre Aoustin
Dan Fante
Christian Bourgois éditeur
Collection 10/18
Domaine étranger
2004
224 pages
Désormais chez 13e note éditions
dans la collection de semi-poche Pulse