La Dérobade, écrit en 1976 par Jeanne Cordelier, raconte l'histoire d'une prostituée de Paris en 1966, du temps où les maisons closes étaient tolérées. Ce texte nous rappelle combien la littérature parle peu et mal de la prostitution, et combien les positions abolitionnistes, règlementaristes et prohibitionnistes sont difficiles à tenir dans les faits.
Vendre son corps ne sera jamais un métier. Ce sera toujours dégradant, ce sera toujours une forme d'esclavagisme où les hommes abusent de leur pouvoir sur les femmes.
« Ce qui ressort de cette longue aventure où le lecteur se dit sans cesse que ça ne peut pas continuer, et où c’est toujours pire, toujours plus atroce, c’est le malheur des putains. Elles ne commencent qu’avec la certitude qu’elles s’arrêteront bientôt, elles ne continuent qu’avec l’espoir de s’arrêter, d’acheter un commerce, de se retirer, mais elles se laissent dépouiller à mesure de tout ce qu’elles gagnent. Et les années passent. Alors pourquoi ? C’est tout le sujet de ce livre [extrait de la préface de Benoîte Groult]. »
Merci à Jeanne Cordelier pour ce texte exceptionnel, intemporel, cette voix hors du commun et courageuse, ce style à la fois lyrique, luxuriant et cru, cette femme lumineuse qui jaillit de l'horreur.