Les fiancés de l’hiver. La Passe-miroir ≡ Christelle Dabos

Sur les conseils de Radis lettré, je me suis lancée dans la saga La Passe-Miroir de Christelle Dabos. Et le moins qu’on puisse dire, c’est que j’ai été totalement happée ! Pendant un mois, j’ai dévoré les 4 tomes, soit environ 2000 pages.

« Ophélie était une excellente liseuse, l’une des meilleures de sa génération¹. »

Sur l’arche Anima, les habitant·es donnent vie aux objets. Les maisons grognent lorsqu’elles sont dérangées, les objets se réparent tout seuls lorsqu’ils sont cassés… 

Dans cet univers façon steampunk, Ophélie est une jeune fille solitaire, réservée, terriblement maladroite (dyspraxique ?) et mal sapée selon les dires de sa très coquette sœur. Elle semble insignifiante et défie toutes les statistiques en s’attirant de nombreux ennuis ! Pourtant, elle possède deux pouvoirs rares chez les Animistes : elle peut se déplacer à travers les miroirs et lire les objets, c’est-à-dire connaître leur histoire et les souvenirs de leurs propriétaires, si bien qu’elle est devenue responsable du musée des objets anciens.

« Si tu échoues à cette tâche, si tu fais échouer ce mariage, je te jure que tu ne poseras jamais plus les pieds sur Anima². »

Seulement, la vie d’Ophélie bascule le jour où les Doyennes, les matriarches d’Anima, décident de la marier à Thorn, du clan des Dragons. Ophélie n’a aucune envie de se marier, elle a même déjà refusé deux prétendants. Mais, pour l’honneur de sa famille, elle doit quitter précipitamment son arche pour aller vivre au Pôle, à la Citacielle, aux côtés de son futur époux.

Qui est Thorn, cet homme immense à la mine aussi avenante qu’une porte de prison ? Quel est ce monde effroyable, façon XVIIe siècle, où tous les coups sont permis pour se faire une place à la cour de Farouk ?

Pourquoi est-ce précisément elle qui a été choisie pour ce mariage diplomatique ?

Mon avis

Ce roman est un immense succès de librairie et d’estime qui séduit aussi bien les ados que les adultes. Et pour cause ! Son efficacité est redoutable : des personnages et des univers hauts en couleurs et contrastés, une intrigue finement tissée, un foisonnement de détails qui authentifient l’histoire, des chapitres courts et haletants qui disséminent des indices et des rebondissements insoutenables, et une bonne dose d’humour et de critique…

C’est peut-être mon côté militant qui déborde, mais le monde fantastique de Christelle Dabos n’est pas seulement divertissant, il porte un regard acéré sur la position des femmes dans les différentes sociétés, et sur la hiérarchie sociale : les domestiques sont exploité·es, maltraité·es, traité·es comme des meubles, tandis que les nobles de la Citacielle se livrent nuit et jour à de fastueuses soirées et de grandes orgies propices aux complots, vêtu·es de robes splendides, de redingotes ou de perruques. Mais qu’on ne s’y trompe pas : les décors et mobiliers somptueux de la cour ne sont qu’illusion, c’est le vernis qui masque la crasse des murs aux briques effritées.

Même si cela ne correspond pas à ce que je lis d’habitude, j’ai moi aussi succombé aux charmes de la Passe-miroir ! Le suspense a été insoutenable, puisque j’ai dans la foulée emprunté et dévoré les trois autres tomes pour connaître la suite des aventures d’Ophélie, cachée derrière ses lunettes qui changent de couleur au gré de ses émotions et enroulée dans sa vieille écharpe amoureuse et câline. 

Pour autant, mon bonheur littéraire a été aussi intense que de courte durée : une fois le dernier livre refermé, je suis très vite passée à autre chose, mais la saga m’a accompagnée et soutenue pendant un mois de lecture, et ce monde imaginaire était salvateur. La littérature est définitivement essentielle et précieuse !

1. Page 46. -2. Page 78.

Les fiancés de l’hiver

La Passe-miroir (tome 1)

Christelle Dabos

Editions Gallimard Jeunesse

2013

528 pages

19,90 euros

(disponible en poche dans la collection Folio)