Audrey Dussutour
Éditions Équateurs
2017
Qu’est-ce que le blob ? Redécouvert en 2000 par le biophysicien Toshiyaki Nakagaki, le blob ne cesse de surprendre. Ce n’est ni un animal, ni un végétal, ni un champignon, c’est pourquoi il a été classé différemment dans l’arbre de la vie au cours des recherches scientifiques. Et pourtant, cet organisme informe composé d’une seule grande cellule est capable de se déplacer, de se nourrir, de se reproduire et d’apprendre.
Le blob se nourrit de champignons, de bactéries, d’autres blobs, mais aussi de flocons d’avoine ! Il sait même se nourrir selon les choix qui lui sont proposés et selon son état de santé.
Le blob n’a pas de cerveau, et pourtant il est doué d’intelligence. Il est capable d’apprendre et de trouver des solutions, d’anticiper les changements de son environnement, de repérer la nourriture et les autres blobs, de faire circuler l’information entre blobs, de cicatriser lorsqu’il est coupé ou de fusionner avec d’autres blobs, si bien qu’il est quasi immortel…
J’avais très envie d’en savoir un peu plus sur le blob, et l’ouvrage d’Audrey Dussutour est très bien fait : l’autrice a su rendre ses recherches très claires, avec des petits dessins qu’elle a elle-même réalisés, organisées en petits chapitres. Cet ouvrage est également drôle : elle raconte par exemple qu’elle a retrouvé son blob au plafond après avoir oublié de le nourrir pendant le weekend !
Mais Audrey Dussutour explique que nous sommes aux balbutiements de la recherche. En effet, les chercheur·ses du monde entier ne travaillent que sur trois espèces, alors qu’il en existerait au moins un millier…
Ces premières découvertes ouvrent des perspectives impressionnantes : d’une part, il y a encore tant de choses à découvrir sur le blob et son fonctionnement. D’autre part, la compréhension du blob pourrait faire progresser la science sur les recherches thérapeutiques contre les maladies comme le cancer, le vieillissement, ou sur l’écologie, puisque le blog recycle les nutriments et les bactéries, ou encore sur l’optimisation des réseaux de transports ! Mais comme toute recherche, le blob pourrait malheureusement être l’objet d’une exploitation marchande…
Mais cet ouvrage ne porte pas seulement sur le blob : Audrey Dussutour raconte aussi sa vie de chercheuse, surtout en tant que femme. Elle explique que la recherche de financement occupe une grande partie du temps, surtout lorsque le domaine de recherche ne semble pas immédiatement applicable, à l’instar du blob. Puisque le métier se précarise, que les places en laboratoire sont très chères et qu’il faut se faire publier dans des revues pour être reconnu·e de ses pairs, la concurrence est très forte. Les chercheur·ses cumulent les CDD et peuvent même falsifier les données et les processus d’expérimentation pour obtenir des résultats plus rapidement et plus « satisfaisants ».
Audrey Dussutour explique aussi que le Crédit impôt recherche accordé aux entreprises afin qu’elles développent leur secteur recherche et développement (R&D) n’est pas efficace. Ce CIR est en réalité une sorte de niche fiscale : non seulement il ne fait pas progresser la recherche dans les entreprises privées, mais en plus il prive les recherches publiques de financement qui, elles, investissent dans les projets à haut risque. Tout ce système pose un vrai problème dans la recherche : cela entraîne la précarisation des chercheur·ses et nuit à la progression des connaissances à long terme.
Voilà donc un ouvrage passionnant, instructif à plusieurs égards, et facile à lire !
1. Page 13.
Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur le blob sans jamais oser le demander
Audrey Dussutour
J’ai lu
2019
190 pages
6,50 euros
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