Martin Page
Éditions Robert Laffont
2017
À travers son cheminement intime vers le véganisme, Martin Page explique la philosophie positive, bienveillante et émancipatrice du mouvement, ainsi que les réticences psychologiques habituelles. Son ouvrage, accessible, didactique et drôle, m’a paru particulièrement stimulant et encourageant, c’est pourquoi je l’offrirai volontiers à mon entourage non végane.
Entre essai et quotidien d’un écrivain fauché mais débrouillard, Martin Page nous raconte son cheminement stimulant vers le véganisme. A travers des anecdotes du quotidien, il explique la philosophie bienveillante et émancipatrice du véganisme, les raisons pour lesquelles nous ne devons plus exploiter et manger des animaux, et les différents termes qui définissent le mouvement (véganisme, antispécisme, animalisme, carnisme…). Les animaux sont en effet des êtres sensibles qui ont intérêt à vivre, comme nous. Être végane, animaliste, antispéciste, c’est ne pas faire de distinction entre les êtres humains et les animaux domestiqués, les animaux d’élevage, les animaux considérés comme beaux et nobles, et ceux qui sont moches !
Son cheminement vers le véganisme a d’abord commencé, comme chacun.e d’entre nous, par des réticences psychologiques fortes (j’aime trop le goût de la viande ; où vais-je trouver des protéines ?) et les arguments qu’on se donne à soi-même pour légitimer son carnisme (je ne mange que de la viande bio et heureuse ; je ne mange pas de bébés animaux comme les veaux…). Cela lui permet de passer en revue les idées reçues, les arguments fallacieux des pro-carnistes (manger des animaux est la loi de la nature ; prendre de la B12, ce n’est pas naturel !).
« La plupart des gens aiment les animaux et ne désirent pas qu’ils souffrent ou meurent. Mais des mécanismes sociaux, subtils, brutaux, totalitaires, coupent les humains de leurs réflexes empathiques. L’industrie et l’éducation traditionnelle nous apprennent à fermer les yeux et à ignorer des choses qui, fondamentalement, sont insupportables à tout le monde. Il y a un travail politique de déconstruction à faire pour nous débarrasser de cet aveuglement confortable2. »
Martin Page souligne combien la position du ministère de la Santé, qui présente le végétarisme et le végétalisme comme dangereux (lorsqu’il ne l’élude pas), est problématique. Le gouvernement français biberonné par le lobbying de la viande, ainsi que les médecins français mal formés, sont en grand retard par rapport à d’autres pays, et contribuent à désinformer les gens pour les détourner du véganisme. Mais cela ne marchera pas. Nous puisons l’information auprès de sources mieux informées, et nous serons de plus en plus nombreux·ses à être végé*arien·ne·s, car le désir d’une société juste et sensible, pour toute forme de vie, gagne du terrain dans les rangs du militantisme.
Je fais miens les mots de Martin Page : « [Quand je suis devenu végétalien], Le monde n’a plus jamais été le même et c’est une des plus belles et importantes choses qui me soient arrivées3. » Le véganisme est en effet une source quotidienne de bonheur, d’émancipation et de nouveaux plaisirs gustatifs. On découvre de nouveaux ingrédients, on s’essaie à la végétalisation des plats traditionnels, on fait preuve d’inventivité et de ruse pour déjouer les pièges du quotidien. De plus en plus de sources permettent de trouver des vêtements et des produits véganes. Je vous redirige néanmoins vers Planète végane d’Ophélie Véron, qui est à ma connaissance l’ouvrage le plus pratique et le plus complet sur la question.
Les animaux ne sont pas comestibles, ouvrage didactique et instructif, bienveillant et drôle, s’adresse aussi bien aux non-véganes qu’aux personnes sensibilisées à la cause. Martin Page montre que l’animalisme est un mouvement riche, protéiforme, qui se nourrit des inspirations de chacun·e, et qui fait partie d’une lutte générale pour la justice et la bienveillance. L’auteur encourage les véganes, et même les personnes qui n’ont pas encore végétalisé leur quotidien, à être tolérant·e·s et à agir pour la libération des animaux. Toute discussion argumentée et sensible en famille ou sur les réseaux sociaux, tout don de temps et d’argent, invitent le véganisme sur la place publique.
Martin Page dit lui-même que le véganisme s’est emparé de sa littérature, qui est par définition politique puisqu’elle véhicule des représentations de la société. Je le rejoins totalement sur ce point, et comme j’ai trouvé son récit sincère et stimulant, j’ai à présent envie de découvrir ses derniers romans, d’autant plus que je n’avais pas aimé On s’habitue aux fins du monde.
Le mouvement prend de l’ampleur ; de plus en plus d’essais, de romans, de documentaires et même tout récemment le film Okja, s’emparent de la question ! Nous sommes encore des pionnier·ères ; nous sommes en marche pour un monde juste et empathique. Je suis impressionnée, heureuse et enthousiaste !
« Ne pas manger des animaux est une libération, je n’arrive pas à voir ça comme une coercition. Quand je réponds [aux non-veganes] qu’eux-mêmes imposent l’omnivorisme à leurs enfants (et donc une morale qui implique la torture et la mort non nécessaires d’animaux), je n’ai pour toute réponse qu’un agressif : "Ce n’est pas pareil." En général, la discussion s’arrête là4. »
Planète végane Ophélie Véron
Zoos. Le cauchemar de la vie en captivité Derrick Jensen
La Libération animale Peter Singer
Ne nous mangez pas ! Ruby Roth (jeunesse)
Les Moissons du futur Marie-Monique Robin
Faut-il manger les animaux ? Jonathan Safran Foer
Théorie du tube de dentifrice Peter Singer
Antispéciste Aymeric Caron
Dans la tête d’un chat Jessica Serra
La vie secrète des animaux Peter Wohlleben
Voir aussi
Le blog de l’auteur et de sa compagne : http://monstroveganes.monstrograph.com/
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Les animaux ne sont pas comestibles
Martin Page
Éditions Robert Laffont
2017
270 pages
18,50 euros
1. Page 35. -2. Page 216. -3. Page 41. -4. Page 104.